Explications relatives sur la poésie de

James D. Morrison

La première difficulté tient à l'idée que le grand public se fait habituellement du "poète", personnage supérieurement "sensible" qui chercherait à retranscrire ses émotions sur le papier. Cette conception, proche de la pensée romantique, a mené vers une impasse intellectuelle à la fin du XIX ème siècle. Les sentiments les plus secrets, les plus profonds, ne peuvent tout simplement pas s'exprimer dans le langage " normal ", encore moins dans les contraintes strictes de la versification classique.

De ce constat d'échec naissent deux courants dans la recherche poétique contemporaine. Le premier maintient les " sentiments personnels " du poète au centre du système de construction poétique, et renonce en même temps à s'exprimer dans un langage intelligible. Le sens du poème est alors beaucoup moins à rechercher dans le signifié des mots que dans les propriétés phoniques de la langue (rythme, cadence, scansion, mélodie etc.). C'est dans cette direction que travaillent, notamment, les poètes de la " Beat Generation" pour lesquels Morrison a ressenti une vive admiration dès ses années de lycée, et qui ne se démentira jamais.

Le second courant prend acte de l'impossibilité à exprimer linguistiquement les " sentiments " du poète, et y renonce. Jugeant même une telle tentative assez prétentieuse, voire cuistre. Ici aussi, le "sens" des mots n'a guère d'importance par rapport aux jeux de langage, aux combinaisons de lettres, aux anagrammes et à d'autres tentatives purement formelles.

 

Ces deux approches conduisent donc à une explosion du langage "normal", en particulier du langage "communicationnel". Chercher à lire la poésie contemporaine, y compris celle de Morrison, en se demandant ce que le texte "veut dire" conduit souvent à des impasses. Morrison explore ces deux pistes avec rigueur. Il joue par exemple volontiers sur la nature des mots.

Cette double tentative d'éclatement du langage ordinaire se légitime d'une manière similaire à celle dont le peintre Jackson Pollock justifiait l'art abstrait : le recours à des figures, à des natures mortes, à des portraits, ne permet pas d'exprimer certains phénomènes fondamentaux de notre époque comme la fission nucléaire ou les ondes radio.

 

La poésie antérieure aux travaux du XX ème siècle cherchait, pour l'essentiel, à raconter une histoire symboliquement chargée, à exprimer un sentiment, ou encore à décrire les objets et les impressions qu'ils inspirent. En somme, il s'agit de recourir essentiellement à un mode narratif lyrique.

Morrison use en virtuose de ces ressources, en particulier pour instaurer une relation directe et personnelle avec le lecteur, lequel ne peut se comporter en simple "spectateur" du poème. Morrison désamorce et en même temps élabore une atmosphère assez inquiétante, où le lecteur se trouve confronté à un texte qui semble le connaître intimement, et qui le révèle à ses propres yeux.

Lire Morrison exige donc une adhésion beaucoup plus intime, une expérience de lecture beaucoup plus intense. Plus précisément, Morrison tente beaucoup moins de narrer une série d'événements que de rendre une atmosphère, une ambiance, et d'y plonger le lecteur. Il s'agit de transmettre l'impression d'étrangeté et de malaise qu’inspire le monde contemporain. Dans une interview, Morrison explique : « J'ai toujours eu cette sensation de quelqu'un … qui ne serait pas exactement chez lui … qui serait conscient de beaucoup de choses mais qui ne serait vraiment sûr de rien ».

 

A de nombreux égards, on peut considérer ces "formes poétiques" comme des figures de style nouvelles inventées par Morrison. Leur étonnante originalité, leur stupéfiante fécondité, trouvent à s'exprimer dans l'ensemble de son œuvre.

Le nombre, la richesse et la subtilité des allusions à d'autres auteurs ou leur citation implicite complique considérablement la lecture. Il est pratiquement impossible de débusquer et de décrypter tous ces sous-entendus : l'incroyable culture générale de Morrison, et sa mémoire presque infaillible, densifient les poèmes à un degré parfois extrême. Morrison tendait à combiner plusieurs poèmes antérieurement travaillés dans de longues compositions.

 

Essai sur la poésie de James Douglas Morrison : Il n'existe, apparemment, qu'un seul travail extensif de niveau universitaire sur la poétique de Morrison : Le dernier Poème du dernier poète, par Tracey Simpson, sorti en 1998.

Sociologie et média : Communication d'une star : Jim Morrison, par Jacob Thomas Matthews, paru en 2003. Travail universitaire repérant et élucidant les dynamiques complexes de la communication et de la médiatisation de Jim Morrison jusqu'à l'institution du mythe de "star absolue". Histoire du "star-system", histoire de la musique américaine, analyse du message " morrisonien " et de ses médiateurs, recul sociologique s'appuyant sur une riche bibliographie, permet justement de "dé-fasciner" le mythe, de délier les rouages puissants toujours entretenu à des fins souvent lucratives, et d'ouvrir enfin l'accès à l'homme, à ses motivations réelles ainsi qu'à sa création.

HWY, an american pastoral, 1969. Durée : 50 min. Sorte de western métaphysique contemporain dont le personnage principal, cheveux longs, canadienne, cuir noir et bottes, interprété par Morrison, descend depuis un lac primordial les encaissements de collines désertiques […]. Le film s'achève sur un panorama nocturne de Los Angeles où l'on devine à peine le reflet mouvant du pantalon de cuir, sur fond de sirènes hurlantes et de bruits de guerre.

Le Roi Barbu : l’équipe de paléontologues dirigée par Jason Head (Université du Nebraska-Lincoln) a découvert un lézard vivant il y a 40 millions d'années ; le "Barbaturex morrisoni". Herbivore mesurant ± 1,80 m et pesant ± 30kg. Barbaturex "roi barbu" et Morrisoni en hommage au chanteur des Doors.

(Source AFP - 5 juin 2013)

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